comme hier
… et plus le temps nous sépare
plus il me reste à penser
qu'il reste de notre histoire
à peine de quoi pleurer.
- Françoise Hardy


As-tu frais souvenir Louise de cette soirée champêtre où tu m’as fait connaître ta géographie physique? Ta robe de seize ans? Les fièvres de ton corps? L'odorante chaleur de ton haleine? Quand on a dansé, dans l'inconscience, sous les mesures du Stay Close To Me de Buddy Holly et les criquets. Que d'images me reviennent! Pas toi?

Je nous revois aux confins d'un décembre, dans le grand minuit, emmitouflés sur ce lac gelé, main dans la main: je te serrais si fort contre moi. Nous avons cherché le plus court chemin de nos coeurs… et nous l'avons trouvé, à cent mille hivers. Je revois aussi ces deux êtres, fiers de leurs corps. Aucune caméra ce soir-là, tout juste l'astre au front d'argent pour graver notre ombre sur la neige. Et quand je me retrouve à cet endroit, l’été, je pleure l’ombre qui ondule sur les vagues… le jour suivant, je me ressaisis, ferme les yeux, freine mon cœur, pense à toi et t'emmène dans la réalité de mon imaginaire. Du tiens, j'en fais un rêve: le journal d’une fille perdue. Est-ce que tu m'aimes Louise?
Tu sais, je t'attends toujours.

Mais où es-tu Louise? Tant de décennies ont croulé sous mes mains. Tant de nuits, mort de toi. Tant de matins, noyé dans la solitude. Trop d’années à t’attendre pour mourir seuls… Je serai fidèle jusqu’au dernier souffle, en route vers ce royaume de la nuit infinie d'où elle est venue te chercher, ma Louise. Mon coeur meurtri, froid de douleur, ne demande que le dernier devoir. Dis qu'elle viendra me chercher! Dis…

C’est insensé pour d'autres que nous Louise mais, quand je t’image belle, immaculée, près de cette frontière inconnue, mon amour se heurte à la stèle que forment tes restes, réunis dans l'urne qu’est mon cœur. Pourquoi? Il divague l’esprit Louise, voilà pourquoi!

Je soupir… c’est vrai : «J’étais à toi peut-être avant de t’avoir vu»* a écrit Marceline… on doit absolument graver ces mots sur notre histoire! L’histoire, comme hier, une décade érotique, un souvenir se lovant devant mes yeux, étalée sur toute une vie, le sens unique de l’humanité.

Quand je suis seul, je peux t’inventer ici, contre moi, t'attribuant mille caresses et cent fécondations… Maintes fois ton image se consume sous mes mains. Ton coeur, ma pensée, nos rêves, quel drôle de cinéma! Souviens-toi encore des longues soirées d’automne, de frimas quand, enlacés nous avons discuté de Lolita, Proust! À la recherche du temps perdu… Où est-il? Derrière l'écran du cinéma imaginaire? Je suis toujours à sa recherche, à ta recherche… une nuit, quand je t'aurai retrouvé, tu verras, je te bâtirai des cathédrales sans mesure où l'on viendra prier sur ton image! Et dès lors tu seras à moi, rien qu'à moi, pour des siècles et des siècles.

Mais je te repose cette question, où es-tu Louise? Que fais-tu? Sache qu'à la lumière du matin, je t’épouserai sur l'horloge avec l’ivresse d'un corps armé, nu du désir de te caresser, te vivre en toi, de fondre à même tes larmes, de brûler nos vies comme la fontaine du poème, l'eau éclaboussée de la perfection… survivre ensemble pour unir nos matins, nos nuits, notre éternité… sans condition, sans permission, à l’unisson.

Tu es Éternité femme… et je t’aime.




© 1991 ronald mc gregor.


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